Un enfant peut-il être traumatisé ?
La souffrance des enfants existe et a été longtemps minimisée.
Or, les syndromes psychotraumatiques de l’enfant sont fréquents, chez les très jeunes enfants comme chez les adolescents et l’évolution peut être prolongée et entraîner un véritable handicap.
Qu’est ce que les syndromes psychotraumatiques de l’enfant ?
Pour qu’un psychotrauma advienne chez l’enfant, il faut, comme pour l’adulte qu’il ait vécu ou ait été témoin d’un évènement impliquant un risque de mort ou de blessure grave avec menace à l’intégrité physique.
Afin que l’enfant soit envahi par la terreur, cela implique qu’il ait intégré le concept de mort. Cette acquisition va dépendre de l’âge de l’enfant. La maîtrise de ce concept est souvent précoce et des enfants de 4 ou 5 ans peuvent parler de mort.
Le développement psycho-intellectuel de l’enfant joue un rôle important dans sa perception de l’évènement comme la perception auditive, l’acquisition des capacités motrices ou du langage.
La présence ou l’absence des parents lors de l’évènement traumatique est un facteur important à prendre en considération.
- L’absence des parents met l’enfant dans l’isolement, sans protection, ce qui aggrave l’effraction traumatique. Le sentiment d’abandon peut être intense et le priver de tout recours.
- Lorsque les parents sont présents, leur manière de réagir, le calme ou l’angoisse dont ils font preuve se transmettra à l’enfant. Le trauma parental peut être en partie le vecteur du trauma de l’enfant.
Lionel Bailly a décrit quatre phases cliniques chez l’enfant victime selon son stade de développement :
De la naissance à un an ou un an et demi
L’enfant ne marche pas, ne parle pas et a une pensée conceptuelle peu développée en particulier en ce qui concerne la mort ou l’intégrité physique.
Une séparation brutale prive l’enfant de tout recours, de toute protection, de toute consolation. Il est dans l’impuissance totale.
Les bruits assourdissants, les cris, la douleur, la faim, la chaleur ou le froid intense, sans mots sont susceptibles de provoquer un traumatisme.
Les symptômes vont être le repli, les pleurs, l’hypervigilance, les troubles du sommeil, de l’appétit, les retards dans le développement ou la régression.
Les jeunes enfants
L’enfant parle, marche, ne maîtrise pas encore la pensée abstraite et est très sensible à la réaction parentale.
Le trauma va être la conséquence de l’effroi vécu par l’enfant mais également de la terreur de l’adulte impuissant.
La perte de la croyance en l’infaillibilité parentale aggrave l’impact traumatique.
Les symptômes peuvent toucher l’appétit, le sommeil, le jeu, l’humeur et s’accompagnent de honte et de retard de développement.
Liste de symptômes de stress post-traumatique :
Pour les enfants de 2 à 4 ans
- Amnésie ou absorption par une activité
- Dépersonnalisation (dissociation)
- Reviviscence du traumatisme qui se révèle par : jeux répétitifs de violences avec souvent identification à l’agresseur, souvenirs fréquents de l’évènement traumatique en dehors du jeu, cauchemars répétés, détresse aux rappels du traumatisme
- engourdissement de la sensibilité ou interférence avec l’élan du développement : retrait social accru, registre émotionnel limité, perte momentanée de capacités développementales acquises auparavant, diminution du jeu
- symptôme d’éveil augmenté : terreurs nocturnes, difficultés à s’endormir, réveils nocturnes répétés, troubles significatifs de l’attention, hypervigilance, réaction de sursaut exagérée
- symptômes non présents antérieurement : agression envers les pairs, les adultes ou les animaux, angoisse de séparation, peut d’aller seul aux toilettes, peur du noir, autres peurs nouvelles, comportement défaitiste ou provocation masochiste, comportements de nature sexuelle et agressive, autres réactions non verbales comme symptômes somatiques, reviviscences motrices (pseudo-paralysie, raideur, chute…), stigmates cutanés, souffrance ou maintien de positions douloureuses.
L’enfant qui a accédé à la pensée abstraite
Le caractère mortifère d’un évènement a alors le même pouvoir traumatique que chez un adulte.
On retrouve souvent chez ces enfants un état dépressif avec culpabilité, difficultés scolaires, asthénie.
Liste de symptômes de stress post-traumatique :
Pour les enfants de 6 à 12 ans
- brutalité à l’égard des autres
- agressivité générale
- dépression
- anxiété
- repli
- symptômes du SSPT
- comportement oppositionnel
- destruction de biens
- mauvais résultats scolaires
- manque de respect à l’égard des femmes
Pour les enfants de 12 à 14 ans
- violence à l’égard des autres
- brutalité
- manque d’estime de soi
- suicide
- repli
- symptômes de stress
- école buissonnière
- mauvais résultats scolaires
- symptômes somatiques
- manque de respect à l’égard des femmes
L’adolescent
Les enfants ne filtrent plus vraiment les évènements mais les adolescents sont encore très sensibles à leurs réactions qui reflètent leur caractère : courage, lâcheté, dévouement, égoïsme…
Liste de symptômes de stress post-traumatique :
- remémorations, cauchemars, peurs
- troubles du caractère, violences à l’égard des autres
- Repli dans la famille
- troubles du comportement alimentaire
- abus d’alcool ou de drogues
- conduites suicidaires
- Baisse soudaine des résultats et de la fréquentation scolaire
- manque de respect à l’égard des femmes
Tous les enfants exposés à un évènement traumatique ne développent pas un syndrome psychotraumatique. Une réaction adaptée au stress ne signifie pas que l’évolution se fera vers une pathologie.
L’intensité et la nature de la réaction immédiate peuvent prédire de symptômes psychotraumatiques durables qui se chronicisent en fonction des capacités de l’enfant, de son histoire, de son entourage, du soutien familial et social.
La prise en charge doit être axée sur la psychothérapie qui doit facilité la parole, la reconnection avec la réalité, la redécouverte de la vérité de l’histoire personnelle et familiale, la réintégration des expériences.