Réforme de la justice pénale des mineurs – adoption d’un code de justice pénale des mineurs
Le Code de la justice pénale des mineurs
Il a été adopté par l’ordonnance n° 2019-950 du 11 septembre 2019.
Certes, le code reprend nombre de dispositions de l’ordonnance du 2 février 1945, mais il apporte d’importants changements, sur le fond comme sur la procédure.
Quels sont les changements apportés ?
Les dispositions de fond
S’agissant des conditions de responsabilité pénale des mineurs, le code énonce dans un article L. 11-1 que « lorsqu’ils sont capables de discernement, les mineurs, au sens de l’article 388 du Code civil, sont pénalement responsables des crimes, délits ou contraventions dont ils sont reconnus coupables ». Cette disposition reprend le principe inscrit à l’article 122-8 du Code pénal.
Mais le même article prévoit, dans l’alinéa suivant que « les mineurs de moins de treize ans sont présumés ne pas être capables de discernement. Les mineurs âgés d’au moins treize ans sont présumés être capables de discernement ». On peut penser qu’en pratique, la responsabilité pénale des mineurs de moins de treize ans devrait être exceptionnelle.
Concernant les mesures, le code affirme, au titre des principes directeurs, le principe de primauté de l’éducation sur la répression, en combinant la formule utilisée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 29 août 2002 et les fonctions de la peine de l’article 130-1 du Code pénal.
L’article L. 11-2 prévoit ainsi que « les décisions prises à l’égard des mineurs tendent à leur relèvement éducatif et moral ainsi qu’à la prévention de la récidive et à la protection de l’intérêt des victimes ».
Le principe se déduit aussi de l’article L. 11-3, qui prévoit quant à lui que « les mineurs déclarés coupables d’une infraction pénale peuvent faire l’objet de mesures éducatives et, si le circonstances et leur personnalité l’exigent, de peines ».
Cependant, la primauté de l’éducation sur la répression admet le cumul le plus large entre les mesures éducatives et les peines (art. L. 111-3), le code venant ici achever l’abandon progressif de l’option des voies éducative et répressive.
Plus précisément, le code revient à un système dualiste, composé de mesures éducatives et de peines.
Les sanctions éducatives qui avaient été créées par la loi n° 2002-1138 du 9 septembre 2002 (et qui n’avaient guère prouvé leur efficacité) disparaissent donc, certaines d’entre elles étant absorbées par la catégorie des mesures éducatives.
Les mesures éducatives
sont quant à elles profondément réaménagées. Le code en propose deux :
– l’avertissement judiciaire (nouvelle dénomination de l’admonestation et de l’avertissement solennel)
– et la mesure éducative judiciaire, qui constitue une mesure « fourre-tout », comprenant des « modules » (insertion, réparation, santé et placement) ou des interdictions (de paraître, d’aller et venir, de rencontrer les coauteurs ou complices ou la victime…), ou encore l’obligation d’accomplir un stage, inspirés de certaines mesures éducatives ou sanctions éducatives actuelles.
S’agissant des peines
le code reprend :
– l’exemption légale de peine en dessous de l’âge de treize ans,
– et la diminution légale applicable à partir de l’âge de treize ans,
– diminution obligatoire entre treize et seize ans (plafonné à la moitié de la peine encourue par un majeur et plafonnée à vingt ans de réclusion en cas de perpétuité encourue par un majeur),
– et pouvant être écartée entre seize et dix-huit ans.
Le code reprend aussi à l’ordonnance du 2 février 1945 les peines inapplicables aux mineurs, comme l’interdiction du territoire, le jour amende, ou l’affichage de la décision, et l’impossibilité de faire application aux mineurs de la période de sûreté.
Les dispositions de procédure
Le Code de justice pénale des mineurs consacre d’abord à la procédure des principes directeurs, dans le titre préliminaire (art. L. 12-4 et s.) :
– publicité restreinte,
– assistance obligatoire du mineur par un avocat,
– droit à l’information et à l’accompagnement des représentants légaux,
– droit d’exercer des voies de recours,
– prise en compte de l’âge au moment des faits.
Ces principes ne sont pas nouveaux et existent aujourd’hui, soit dans l’ordonnance du 2 février 1945, soit dans la jurisprudence. Mais ils sont ici consacrés.
S’agissant des acteurs de la justice pénale des mineurs, le code n’apporte guère de nouveauté, puisqu’il reprend ceux que nous connaissons aujourd’hui :
– juridictions (juge des enfants, tribunal pour enfants, cour d’assises des mineurs, tribunal de police, chambre spéciale des mineurs…),
– protection judiciaire de la jeunesse,
– et ministère public.
On peut cependant relever ici que désormais le premier acteur -et cela n’est pas innocent- n’est pas le juge des enfants, mais le parquet.
Mais le juge des enfants se voit reconnaître la possibilité de prononcer seul, en audience de cabinet, des peines autres que les peines d’emprisonnement.
Cela étant, concernant la procédure, ce qui mérite surtout d’être souligné c’est la généralisation de la césure du procès pénal du mineur, consistant à distinguer une première audience sur la culpabilité et l’action civile et une seconde relative aux mesures éducatives et aux peines. Inspirée de la technique de l’ajournement de peine, la césure du procès pénal avait été proposée par la commission « Varinard », et inscrite dans l’ordonnance du 2 février 1945 (art. 24-5 et s.) par la loi n° 2011-939 du 10 août 2011.
Le code en fait le schéma normal de procédure, et réserve l’instruction aux crimes, et, de manière exceptionnelle, aux délits complexes.
– Il est prévu que l’audience sur la culpabilité se tienne dans un délai de trois mois après l’interpellation,
– et que l’audience sur la sanction intervienne ensuite dans un délai de six à neuf mois.
Mais, dans l’intervalle, une mesure éducative judiciaire provisoire peut être prononcée par le juge des enfants.
En outre, le mineur peut être astreint à un contrôle judiciaire, prévoyant un certain nombre d’interdictions ou d’obligations provisoires.